LES PARABOLES DU SEIGNEUR, par Dr. Wilbert Kreiss - index
LE BON SAMARITAIN: Luc 10:25-37
Que dois-je faire pour hériter la vie éternelle?
Cette parabole est propre à l'évangéliste Luc. Elle montre, comme tant d'autres, un bel aspect du
tempérament de cet homme, son côté humain et bon. Un "docteur de la loi", donc un spécialiste des
Ecritures, vient trouver Jésus. Il veut l'éprouver, le tester, pour se faire une idée de son savoir, mais
aussi de ses positions théologiques. S'agit-il d'un piège destiné à prouver qu'il est un hérétique, donc
un homme qu'il faut réduire au silence? "Que dois-je faire?" Pour ce théologien, le salut s'obtient en
faisant quelque chose. Il faut faire quelque chose, mais quoi? Il veut être sauvé, mais il veut l'être en
faisant quelque chose. Il aborde donc la question la plus importante qui soit, celle du salut.
Et Jésus ne lui répond pas. Ou plutôt, il lui répond par deux contre-questions. Qu'il réponde lui-même
à sa question, mais qu'il le fasse sur la base de l'Ecriture Sainte! On constatera une fois de plus la
maîtrise pédagogique du Christ. Le docteur de la Loi est désarçonné. Jésus lui demande de réciter un
texte de la Loi qu'il connaît sûrement par coeur. En d'autres termes: "Que ta raison soit biblique, et je
serai d'accord avec toi!"
Tu aimeras le Seigneur, ton Dieu... Tu aimeras ton prochain...:
Le docteur de la Loi connaît sa Bible. Il cite Deutéronome 6:4.5 et Lévitique 19:18. Il sait résumer la Loi
en termes bibliques; il connaît à merveille ces deux grands classiques pour tout Juif pieux. La Loi exige
qu'on aime Dieu, et qu'on l'aime de tout son coeur, de toute son âme, de toute sa force et de toute sa
pensée. En un mot, dans tous les recoins de son être et avec toutes ses ressources. Toujours, en tout
et par-dessus tout. Dans tous les domaines et sans réserves. Dieu ne veut pas de demi-coeur, de demi-
âme, de demi-raison, de demi-force. Tout lui appartient et tout doit lui être consacré en entier. Cette
phrase qui faisait partie du "Shema Israël", de la confession de foi d'Israël, est inscrite sur un parchemin
placé dans les phylactères des Juifs pieux de tous les temps.
Le docteur de la Loi y ajoute le résumé de la deuxième table de la Loi. Il nous est demandé d'aimer le
prochain. Pas autant que Dieu, ce serait de l'idolâtrie, mais autant que nous-mêmes. Pas un peu, ni
parfois, ni quand cela nous plaît, mais autant que nous-mêmes. Ni plus ni moins, et c'est énorme.
Jésus donne raison au docteur de la Loi. Il a fort bien répondu. Sa réponse est on ne peut plus biblique.
S'il fait cela, il sera effectivement sauvé. Quiconque accomplit effectivement la Loi est sauvé. Pas de
problème. Pas de problème en tout cas, du moment qu'on sait aussi que celui qui "observe toute la loi,
mais pèche contre un seul commandement, devient coupable de tous" (Jacques 2:10) et que si "votre
justice ne surpasse celle des scribes et des pharisiens, vous n'entrerez pas dans le royaume des cieux"
(Matthieu 5:20). Le problème est que cet homme pense avoir observé toute la Loi. Il ne se connaît pas
de fautes et n'a donc pas de raisons de douter de son salut. S'il pose des questions à Jésus, c'est
seulement pour le tester, voire lui tendre un piège. Alors Jésus va se placer sur le terrain de cet homme,
le terrain de la Loi, et lui montrer ce qu'est l'accomplissement véritable des commandements divins.
La Loi ne nous demande pas d'aimer tous les hommes du monde. C'est impossible, car un tel amour
présupposerait qu'on les connaisse tous. Je ne peux pas aimer ceux que je ne connais pas. Par contre,
elle nous demande d'aimer notre prochain. Pas simplement notre ami, notre bienfaiteur, celui qui nous
est sympathique, celui qu'il est facile d'aimer, mais notre prochain. D'où la question: Qui est notre
prochain? Et c'est là que le Christ va lui tendre un piège à son tour. Gentiment, mais un piège redoutable
auquel il ne pourra pas échapper.
Un homme descendait de Jérusalem à Jéricho. Il tomba au milieu des brigands...:
Telle sera la réponse à la question du docteur de la Loi, une parabole au sens large du terme, une
illustration qui lui permettra de comprendre qui est son prochain. Une nuance importante cependant: le
docteur de la Loi avait demandé qui était son prochain (V.29). Jésus, après avoir raconté sa parabole,
lui demandera de qui il est le prochain. La flèche ne va donc pas du prochain à moi, mais de moi au
prochain. Nous reviendrons là-dessus.
"De Jérusalem à Jéricho": la route est en grande partie déserte, réputée pour les brigands qu'on y
rencontrait. Ils furent là au moment opportun. L'occasion était bonne: un voyageur à détrousser. Ils le
frappèrent, lui prirent certainement sa bourse, sa monture et tout ce qui avait quelque valeur, et
disparurent, le laissant à demi-mort.
Un sacrificateur passa outre... Un lévite passa outre:
Le prêtre changea carrément de côté et continua son chemin. Allait-il à Jérusalem ou en venait-il pour
rentrer à Jéricho où habitait une colonie de prêtres? Le texte ne le dit pas. S'il se rendait à Jérusalem
pour officier dans le temple, il ne fallait pas qu'il touche le blessé, et encoree moins un cadavre. Le
contact du sang ou d'un mort rendait impur et disqualifiait pour le service du temple (Nombres 19:11-22).
Toujours, même en cas d'urgence, même quand il s'agit de secourir un blessé. Du moins il en était
convaincu. Voilà un homme du temple qui connaît la Loi et la prêche, qui devrait savoir ce qu'aimer veut
dire, qui devrait savoir notamment que la loi de l'amour passe avant toutes les autres, et qui passe outre.
Il prêche et officie, mais ne pratique pas. Personne ne le voit; il change de côté, presse le pas et
disparaît. Un Lévite, qui se rendait sans doute vers le temple pour les même raisons, fit la même chose.
Ce doit être terrible, quand, au nom de la religion, on s'interdit l'amour!
Mais un Samaritain... fut ému de compassion lorsqu'il le vit:
Comme par hasard, un Samaritain, un de ces citoyens de la Samarie que méprisaient les Juifs, qu'ils
prenaient pour des mécréants, des idolâtres, des gens qui avaient pactisé avec le paganisme. Cf. Luc
9:53; Jean 4:9; 8:48. Consulter aussi la rubrique "Samarie" ou "Samaritain" dans un dictionnaire biblique.
Jésus a dû faire sensation en présentant cet homme généreux et bon comme un Samaritain.
S'ensuit une belle description de l'aide que ce Samaritain apporta au blessé. Comme tout voyageur
prévoyant, il avait emporté avec lui du vin pour se désaltérer et désinfecter d'éventuelles plaies, et de
l'huile pour soulager une douleur. Il soigna le malheureux, le plaça sur sa monture et le conduisit à
l'auberge. Devant poursuivre sa route, il demanda à l'aubergiste de prendre soin du blessé et de lui
présenter la facture à son retour. Il s'engageait ainsi à payer la pension et les soins. Peut-être
l'aubergiste le connaissait-il. En tout cas, il lui fit confiance. Qu'aurait pu faire de plus ce bon Samaritain
qui méritait si bien l'épithète avec laquelle il est entré dans l'histoire? Et il fallut que ce fût un Samaritain,
pour que le docteur de la Loi comprenne ce qu'aimer veut dire.
Lequel de ces trois...?
La parabole est terminée. Il s'agit maintenant de répondre à la question que le docteur de la Loi avait
posée: "Qui est mon prochain?" (V.29). La question était mal posée. Ainsi formulée, on se perd dans la
théorie, sans jamais agir. Il aurait été préférable que le docteur de la Loi lui demande: "De qui suis-je
le prochain?" Cette question-là au moins aurait été pratique et existentielle. Aussi Jésus demande-t-il:
"Lequel de ces trois te semble avoir été le prochain de celui qui était tombé au milieu des brigands?" Il
renverse donc la question, et le docteur de la Loi la comprend fort bien et y répond correctement.
Va, et toi, fais de même!
Voilà ce que signifie aimer le prochain autant que soi-même. Rien de moins! Peut-être cet homme
comprit-il ce jour-là qu'il ne pouvait pas aimer son prochain autant que lui-même et qu'il lui fallait une
autre justice que la sienne pour être sauvé, la justice de Jésus de Nazareth, le Rédempteur d'Israël.
Thèmes de réflexion:
- Jésus a affaire à un casuiste, un spécialiste de la Loi chargé d'enseigner aux Juifs comment il
faut se comporter dans toutes les circonstances de la vie pour plaire à Dieu. Il se trahit avec le verbe
"faire". Il veut "faire" quelque chose pour être sauvé. il veut mériter le salut. Or les légistes et tous les
théologiens de ce type sont allergiques à la grâce. La justice se codifie, et ils croient qu'ils peuvent faire
de même avec l'amour. Or l'amour échappe à toute définition casuistique. Il est la mort des règlements
et des codes. On peut tout mettre en formules, sauf l'amour. Et cela, il faut que cet homme l'apprenne.
Le docteur de la Loi assène ses paragraphes, au demeurant fort justes, et pour le coincer, Jésus va
l'aborder sur son propre terrain, la Loi.
- L'entretien aurait pu se terminer au V.28, tant les réponses du docteur de la Loi étaient
satisfaisantes. Mais ce casuiste n'est pas satisfait. Il veut justifier la question qu'il vient de poser et ainsi
se justifier lui-même. Aimer? D'accord, mais qui? Il demande donc à Jésus une sorte de portrait-robot
du prochain. Il veut une définition du prochain qui soit limpide et qui lui permette de faire son devoir.
Sans doute les réponses qu'il avait entendues jusque-là ne l'avaient-elles pas entièrement satisfait,
parce qu'elles étaient trop vastes ou trop étroites, trop vagues ou trop précises. Aimer le monde entier?
C'est impossible! N'aimer que certains hommes? Oui, mais lesquels? Faut-il aussi aimer les ennemis,
les pécheurs, les païens? Peut-être a-t-il une leçon de sincérité à donner à ceux qui clament sur les toits
qu'ils aiment le monde entier. Cela fait bien et surtout on se fait du bien, en disant cela, mais c'est faux,
parce que ce n'est pas possible. C'est le plus sûr moyen de n'aimer personne.
- La leçon de Jésus est claire: le prochain, ce n'est pas moi qui le choisis (V.29), mais c'est celui
qui me choisit, c'est celui qui fait de moi son prochain, qui se fait si proche que je deviens son prochain
(V.36). Il ne se laisse pas cerner une fois pour toutes. Il est impossible de savoir par avance qui le sera
et qui ne le sera pas. Le prochain est ainsi l'écharde dans la chair de toutes les morales, de toutes les
propres-justices. Il n'y a pas de compteur Geiger qui permette de le détecter de façon infaillible. Pour
répondre à la question difficile du docteur de la Loi, Jésus raconte une histoire toute simple, et il n'est
pas question de faire de l'allégorie comme l'a fait Origène au III° siècle et tant de théologiens à sa suite
qui ont assimilé l'homme descendant de Jérusalem (le paradis perdu) à Jéricho (la perdition) à Adam
et à ses descendants assaillis par les brigands que sont le diable, le monde et le mal, identifié le bon
Samaritain au Christ, et l'auberge à l'Eglise avec son enseignement et ses sacrements.
- Jésus répond non pas par une définition, mais par une situation. A un casuiste, il répond par un
cas, un cas bien précis et ponctuel. C'est que le prochain est toujours quelqu'un de précis et d'unique.
C'était cet homme-là qui se trouvait ce jour-là sur ce chemin-là qui allait de Jérusalem à Jéricho. Ce peut
être n'importe qui, du moment qu'il se trouve dans cette situation-là. Il a besoin de secours, besoin de
quelqu'un qui lui vienne en aide. Il est donc mon prochain dès l'instant où je le croise et vois son
problème. Il est celui qui me dérange, qui bouleverse mon plan, mes projets, mon histoire. Le prochain
ne se programme pas, ne se met pas en fiche une fois pour toutes. C'est mon fils qui a tout à coup
besoin que je lui parle, ma femme à qui je devrais tenir compagnie au moment précis où je m'apprêtais
à faire autre chose. C'est l'ami pour qui je vais éteindre la télé pour lui rendre visite. Rien, absolument
rien ni personne ne peut me dire à l'avance qui est mon prochain. Je suis seul, terriblement seul à devoir
le découvrir.
- Le légaliste ne laisse aucune place au hasard. Chez lui, tout est réglé d'avance. Il sait à l'avance
qui est son prochain, qui ne l'est pas et qui ne pourra jamais l'être. Le prêtre et le Lévite de la parabole
en sont l'illustration. Ils sont coincés, ou plutôt se laissent coincer par la Loi. Ils fuient par obéissance
envers la Loi. Elle interdisait en effet au personnel du temple de toucher un mort (Lévitique 21:1-4;
Ezéchiel 44:25.26) ou d'entrer en contact avec le sang. Il ne faut donc pas qu'ils courent de risque. Qu'il
soit mort ou simplement blessé, cet homme représente un danger pour eux. Alors ils font un détour et
poursuivent leur route. Moins par méchanceté que par scrupule, pour ne pas profaner le temple et, à
travers le temple, tout Israël. Ce malheureux ne peut pas être le prochain, car ils ne peuvent pas être
là pour lui. Ils n'ont rien à lui donner. La Loi le leur interdit! Ils mettent la loi rituelle, c'est-à-dire le rite,
au-dessus de l'amour.
- Jésus ne s'en prend pas à la Loi elle-même, mais à une loi mal interprétée, à une loi qui refuse
l'exception, l'urgence, une loi qu'on oppose à l'amour au lieu de voir dans cet amour son
accomplissement, une loi qu'on dresse contre l'amour et qu'on élève au-dessus de lui. Saint Augustin
disait: "Ama et fac quod vis", "aime et fais ce que tu veux". Ainsi Jésus ne s'est pas dressé contre le
sabbat, mais contre une certaine observance du sabbat, servile, mécanique, automatique, butée, dénuée
d'amour. Il y a des lois, surtout si elles sont rituelles, qu'il faut savoir faire sauter au nom de l'amour.
- Le bon Samaritain. Non pas un secouriste diplômé, en quête de blessés à sauver, mais un
homme comme nous qui avait ses projets et dans la vie duquel fait irruption un semblable qui va devenir
son prochain. C'est un Samaritain, pour tout Juif de l'époque un faux-frère, un déviationniste, un traître,
un hérétique. Samaritains et Juifs ne s'aimaient pas, et ils ne s'en cachaient pas. Ce n'est pas qu'ils
s'écorchaient, se brûlaient, se torturaient, se pendaient, s'écartelaient comme on l'a fait par la suite dans
l'Eglise chrétienne, et nous aurions mauvaise grâce de leur faire la leçon. Simplement ils ne se parlaient
pas, ils s'évitaient, changeaient de trottoir, faisaient un détour pour n'avoir pas à se saluer. Ils n'étaient
pas prochain l'un pour l'autre. Un faux-frère ne peut pas être mon prochain!
Le Samaritain avait lui aussi sa loi qui lui dictait de passer outre, mais, comme disait quelqu'un, "chez
lui la piété n'a pas tué la pitié". Il n'est pas un zombie bien réglé, téléguidé par un code abstrait. Il envoie
promener sa loi, la tradition de son peuple, car un homme a besoin de lui. Il n'y a plus ici un Juif et un
Samaritain, un orthodoxe et un hérétique, mais deux hommes dont l'un a besoin de l'autre. Le Samaritain
ne nie et ne rejette pas ce qui le sépare du Juif. Il le dépasse et le transcende. Il existe une conception
de la Loi qui ne laisse aucune place à la pitié. Ce n'est pas celle du Samaritain. Il a un coeur qui ne bat
pas sur commande, mais qui sait battre librement et inventer. Pour lui, l'amour ne consiste pas à s'en
prendre aux structures sociales et à faire de la politique. Il ne fulmine pas contre le manque de sécurité
entre Jérusalem et Jéricho. Il ne dépose pas de pétition à la préfecture pour qu'on mette un détachement
de C.R.S. en position sur ce chemin dangereux. Non, il ne fuit pas dans l'action collective et à longue
échéance, mais agit ponctuellement, dans l'immédiat. Il descend de son âne et retrousse ses manches.
Agir sur les structures, obtenir plus de sécurité et de justice? Créer des hôpitaux et des centres de soins,
fonder des caisses d'entraide et de solidarité? Oui, bien sûr, mais à condition de ne pas oublier l'action
immédiate et ponctuelle, de ne pas avoir peur de descendre de son bourricot et de se salir un peu!
- L'amour agit. Tout de suite. Le Samaritain s'approche (V.34). Il n'y a pas de prochain, s'il n'y a
pas d'approche. L'amour du prochain commence avec nos pas qui interrompent une route précise pour
en rencontrer une autre. Aimer, c'est tout d'abord casser sa route, ses projets, son avenir, pour adopter,
ne serait-ce que momentanément, ceux d'un autre. Pour un temps, le blessé va devenir le seul avenir,
la seule préoccupation, le seul projet du Samaritain. En l'asseyant sur sa monture, il va jusqu'à lui donner
sa propre place. Il y a permutation. Aimer, c'est savoir donner sa place et adopter celle des autres.
Aimer, c'est faire pour le prochain tout ce dont il a besoin, à court terme (V.34) et à long terme (V.35).
On ne peut pas tout faire pour un seul prochain. Il y en a d'autres, après tout, et on a son métier et sa
famille. C'est pourquoi l'amour agit dans l'immédiat, directement (V.34), et dans un deuxième temps par
l'intermédiaire de spécialistes, d'organismes charitables, d'oeuvres humanitaires (V.35). On ne peut pas
donner raison à tous ceux qui n'aiment jamais que le prochain lointain, celui du Tiers-Monde qu'on
montre à la télé mourant de faim, tous ces malheureux qu'ils ne verront jamais, mais qui ignorent le
malheureux qui gît à leur porte (Luc 16:20) ou sur le chemin sur lequel ils marchent (Luc 10:31).
- Jésus n'a prononcé aucun jugement sur le prêtre et le Lévite. Il n'a pas non plus parlé du bon
Samaritain, mais du Samaritain tout court. Il laisse au docteur de la Loi le soin de conclure et de formuler
un jugement. Et ce faisant, il le coince. Il est féroce. Il veut entendre les lèvres de son interlocuteur
prononcer le mot "Samaritain", un mot que celui-ci voudrait n'avoir pas à prononcer. Mais c'est trop
demander au casuiste. Au lieu du mot détesté, il sort une admirable périphrase: "C'est celui qui a exercé
la miséricorde". Il n'a pas encore accédé à la liberté des enfants de Dieu et reste prisonnier de ses
tabous et de ses traditions. Et pourtant il a compris!
- Jésus opère un renversement spectaculaire. Pour lui, le prochain n'est pas le blessé, mais le
Samaritain. Cf. les V.29 et 36. Aimer, c'est agir, mais pour pouvoir aimer, il faut d'abord savoir découvrir.
Découvrir celui qui a besoin de nous. Si nous attendons de savoir qui pourrait bien être notre prochain,
nous ne le découvrirons jamais. Alors, au lieu de poser un tas de questions sur le prochain, comme l'a
fait ce docteur de la Loi, il vaut mieux se mettre en route, ouvrir les yeux et devenir soi-même prochain
pour les autres. "La réponse à ta question du V.29, cher docteur de la Loi, c'est toi! Le prochain, ce n'est
pas un autre, c'est toi. C'est l'homme que tu peux devenir pour autrui". Le prochain, cela ne s'explique
pas, cela ne s'analyse pas, cela ne s'enferme pas dans une formule, cela se devient. "Va, et toi, fais de
même". Va et découvre ton prochain, et découvre-le en devenant son prochain. Il n'existe pas tout seul.
Pour qu'il y ait un prochain, il faut qu'il y ait deux hommes. Le prochain n'existe pas sans moi. Je n'aurai
de prochain que si je deviens le prochain d'autrui. Je n'en trouverai jamais, si je n'accepte pas d'en
devenir un!
Questions de révision et exercices:
1) Quel genre d'homme était le docteur de la Loi? Quelles étaient sa religion et sa
théologie et pourquoi aborda-t-il Jésus?
2) Que cache la question du V.25?
3) Quelles ont pu être les raisons profondes qui incitèrent le sacrificateur et le Lévite
à poursuivre leur route sans secourir le blessé?
4) Pourquoi Jésus présente-t-il le bienfaiteur de cette parabole comme un Samaritain?
5) Expliquez ce qui a pu se passer dans le coeur de cet homme pour l'inciter à faire tout
ce qu'il a fait.
6) Quel est l'enseignement de cette parabole concernant le prochain? Qui est-il?
Donnez-en une définition.