LES PARABOLES DU SEIGNEUR, par Dr. Wilbert Kreiss - index

 

LES DEUX SERVITEURS: Matthieu 24:44-51

Cette parabole se trouve aussi chez Luc. Cependant elle n'y figure pas dans les discours eschatologiques du Christ Luc 21), mais au beau milieu de son évangile (Luc 12:42-46).

Tenez-vous prêts:

Cette exhortation constitue la charnière entre ce qui précède et ce qui suit. Non seulement personne ne connaît le jour ni l'heure du retour de Jésus-Christ (Matthieu 24:36), mais il reviendra quand personne ne s'y attendra (Matthieu 24:39.44). Il n'est pas difficile de monter la garde, quand on sait qu'un voleur viendra la nuit même (Matthieu 24:43). il est beaucoup plus difficile de la monter, quand on se doute qu'il viendra un jour, mais qu'on ignore quand.

Jésus reviendra. Il nous l'a dit. Il nous en a aussi indiqué les signes. Par contre, il ne nous a pas dit quand. Il s'agit donc d'être vigilant. C'est une leçon que le Christ nous donne sous forme d'une parabole.

Quel est donc le serviteur fidèle et prudent...?

Ce n'est pas un serviteur comme les autres, puisque le maître l'a établi sur son personnel. C'est un homme de confiance et un confident. Il représente les pasteurs et prédicateurs au service du Christ, chargés de prendre soin de ses autres serviteurs que sont les membres de l'Eglise. C'est un grand honneur que de pouvoir prendre soin de la maisonnée de Jésus, une grande marque de confiance qui doit inciter tout pasteur à être "fidèle et prudent" (la traduction "fidèle et prévoyant" est préférable).

Un tel serviteur est "heureux", s'il fait ce que son maître attend de lui et distribue aux autres "la nourriture au temps convenable". Il agit ainsi en l'absence de son maître. Il ne profite pas de ce que le patron n'est pas là pour se prélasser au soleil, vivre dans la paresse et l'oisiveté ou abuser de l'autorité qu'il lui a confiée. Non, il accomplit sa mission et fait fidèlement ce qu'on lui a demandé de faire. Le maître, à son retour, satisfait des services de cet homme, "l'établira sur tous ses biens". "Sur dix villes..., sur cinq villes", selon la parabole des mines (Luc 19:11-27). Le pasteur fidèle participera au règne et à la gloire du Christ. Cf. Matthieu 25:21.23; Luc 19:17.19.

Mais si c'est un méchant serviteur, qui dise en lui-même...:

Il ne parle pas, ou plutôt il parle à lui-même. Il est son propre interlocuteur qui cache ses sentiments et ses intentions aux autres. Il a accepté la marque de confiance de son maître, a promis d'être zélé et fidèle, mais c'est un hypocrite qui recevra un salaire d'hypocrite: "Il le mettra en pièces et lui donnera sa part avec les hypocrites".

La méchanceté de son coeur se traduit en actions. Au lieu de prendre soin des serviteurs qui lui sont confiés, il les maltraite. C'est un tyran qui donne libre cours à ses passions, passions qu'il avait su bien cacher, sinon le maître ne lui aurait pas confié une telle fonction. Il illustre les pasteurs qui, dans l'exercice de leur ministère, cherchent leur propre satisfaction, satisfont leurs intérêts et leurs passions.

Le jour où il ne s'y attend pas et à l'heure qu'il ne connaît pas:

Ce serviteur devient la victime de sa folie. Son maître revient à l'improviste, sans prévenir. Il le surprend en pleine action. Sans doute le serviteur pensait-il avoir, avant le retour du patron, le temps de dissimuler les preuves de son mauvais comportement. En cela il s'est trompé. En satisfaisant les passions de la chair, on s'aveugle et on devient insensé.

Le châtiment du mauvais serviteur fut terrible. Il fut taillé en pièces. C'est dire que la leçon est sérieuse et qu'il s'agit pour les chrétiens, et tout spécialement pour les serviteurs du Christ que sont les pasteurs, d'être fidèles dans l'attente de son retour.

 

Thèmes de réflexion:

• Cette parabole, comme celle des dix vierges, nous apprend que Jésus tarde à venir. Il est facile d'être vigilant, quand le retour est imminent. Trop facile même, comme le montre l'exemple des chrétiens de Thessalonique qui cessèrent de travailler et de vivre dans le monde (1 Thessaloniciens 4:11; 2 Thessaloniciens 2:3). La vigilance est chose beaucoup plus difficile, quand le retour se fait attendre. Et c'est terriblement dangereux. On a vu plus d'une sentinelle s'endormir à son poste de garde...

• C'est là le grand dilemme de l'Eglise. Il y a les trappistes et tous ceux qui leur ressemblent. Ils ne sont pas simplement voyageurs et pèlerins sur cette terre, mais des étrangers. Ce sont les traumatisés, les obsédés de la parousie. Et il y a ceux qui n'y croient plus, qui l'ont oubliée, qui confondent Evangile et politique, résurrection et âge d'or sur terre, qui ne savent ou ne croient plus qu'il y aura un jugement et une éternité. Il y a ceux qui attendent dans la crispation et rejettent le monde, et ceux qui n'attendent plus et qui se perdent dans le monde. Savons-nous nous situer entre ces deux graves erreurs?

• Il y a la fausse et la bonne manière d'attendre la fin du monde. Il y a les pasteurs qui, parce que Jésus tarde, veulent prendre sa place. Au lieu de servir, ils gouvernent, pensent plus à leur poste et leurs privilèges qu'à leurs fidèles, parlent plus d'eux-mêmes et de leur ministère que des âmes qui leur sont confiées. La tâche du pasteur fidèle et prévoyant est de bien nourrir ceux qui lui sont confiés. Par la Parole et les sacrements. Par la prédication, la catéchèse et la cure d'âme. Un tel serviteur attend son maître à la fois comme s'il devait revenir le jour même et comme s'il n'allait revenir que dans mille ans. il agit comme s'il avait à la fois peu de temps et beaucoup de temps. Il est rapide, mais pas angoissé, vif, mais pas anxieux, actif, mais paisible et serein. Il considère ceux qui sont confiés à ses soins comme des serviteurs au même titre que lui et ne les prend pas pour des inférieurs. Le mauvais serviteur bat et frappe, parce qu'il a oublié que les autres serviteurs de la maison 1) lui ont été confiés, 2) qu'ils sont ses frères. Il sévit, menace et frappe, au lieu de servir, d'aimer et d'aider. Non que le pasteur ne doive pas prêcher la Loi et réprimander, mais il doit distinguer correctement Loi et Evangile et traiter ses paroissiens en coserviteurs, enfants de Dieu et frères dans la foi. S'il doit parfois blesser, il lui faut ensuite panser, guérir, consoler. Il y a dans l'Eglise beaucoup de meurtrissures inutiles et dictées par la méchanceté et non l'amour. Nous sommes parfois experts en meurtrissures. Jésus nous demande de le devenir en nourriture.

 

Questions de révision et exercices:

1) Quel est le point de comparaison de cette parabole?

2) Pourquoi le bon serviteur est-il bon et pourquoi le mauvais serviteur est-il mauvais? En d'autres termes, qu'est-ce qui incite l'un à être bon et l'autre à être mauvais?

3) Comment décririez-vous, à la lumière de cette parabole, un bon pasteur? Comment exerce-t-il son ministère et qu'est-ce qui le motive?

    

17-Septembre-2002, Rev. David Milette.