La Confession d'Augsbourg de 1530 |
LA PREMIÈRE PARTIE:
ARTICLES FONDAMENTAUX DE LA FOI ET DE LA DOCTRINE
Article 1. -- De Dieu
Nos Églises enseignent en parfaite unanimité
la doctrine proclamée par le Concile de Nicée : à
savoir qu'il y a un seul Être divin, qui est appelé et qui
est réellement Dieu. Pourtant, il y a en lui trois Personnes,
également puissantes et éternelles : Dieu le Père,
Dieu le Fils, Dieu le Saint-Esprit ; tous les trois un seul Être
divin, éternel, indivisible, infini, tout-puissant, infiniment sage
et bon, créateur et conservateur de toutes choses visibles et invisibles.
Par le terme de Personne, nous ne désignons pas une partie ni une
qualité inhérente à un être, mais ce qui subsiste
par lui-même. C'est ainsi que les Pères de l'Église
ont entendu ce terme.
Nous rejetons donc toutes les hérésies
contraires à cet article : nous condamnons les Manichéens
qui ont statué deux dieux, un bon et un mauvais, les Valentiniens,
les Ariens, les Eunomiens, les Mahométans et autres. Nous
condamnons aussi les Samosaténiens, anciens et modernes, qui n'admettent
qu'une seule Personne, et qui, en usant de sophismes impies et subtils,
prétendent que le Verbe et le Saint-Esprit ne sont pas des personnes
distinctes, mais que le « Verbe » signifie parole ou une voix,
et que le « Saint-Esprit » ne serait autre chose qu'un mouvement
produit dans les créatures.
Article 2. -- Du Péché Originel
Nous enseignons que par suite de la chute d'Adam,
tous les hommes nés de manière naturelle sont conçus
et nés dans le péché ; ce qui veut dire que, dès
le sein de leur mère, ils sont pleins de convoitises mauvaises et
de penchants pervers. Il ne peut y avoir en eux, par nature, ni crainte
de Dieu ni confiance en lui. Ce péché héréditaire
et cette corruption innée et contagieuse est un péché
réel, qui assujettit à la damnation et à la colère
éternelle de Dieu tous ceux qui ne sont pas régénérés
par le Baptême et par le Saint-Esprit.
Par conséquent, nous rejetons les Pélagiens
et autres qui, au mépris de la passion et du mérite de Christ,
rendent bonne la nature humaine par ses forces naturelles, et soutenant
que le péché originel n'est pas un péché.
Article 3. -- Du Fils de Dieu
Nous enseignons aussi que Dieu le Fils est
devenu homme, né de la pure Vierge Marie, et que les deux natures,
la divine et l'humaine, unies inséparablement dans une personne
unique, constituent un seul Christ, qui est vrai Dieu et vrai homme.
Il est véritablement né, il a réellement souffert,
il a été crucifié, il est mort, il a été
enseveli, afin qu'il s'offrit en sacrifice, non seulement pour le péché
originel, mais aussi pour tous les autres péchés, afin d'apaiser
la juste colère de Dieu.
Le même Christ est descendu aux enfers
; il est réellement ressuscité le troisième jour,
monté au ciel, assis à la droite de Dieu, afin qu'il étende
son règne et sa domination éternels sur toutes les créatures,
qu'il sanctifie, purifie, affermisse et console par le Saint-Esprit tous
ceux qui croient en lui, et afin qu'il leur donne en partage la vie et
toutes sortes de dons, et qu'il les protège contre le diable et
le péché.
Ce même Seigneur Jésus-Christ
reviendra enfin visiblement, pour juger les vivants et les morts, etc.,
-- selon le Symbole des Apôtres.
Article 4. -- De la Justification
Nous enseignons aussi que nous ne pouvons pas
obtenir la rémission des péchés et la justice devant
Dieu par notre propre mérite, par nos oeuvres ou par nos satisfactions,
mais que nous obtenons la rémission des péchés et
que nous sommes justifiés devant Dieu par pure grâce, à
cause de Jésus-Christ et par la foi, -- lorsque nous croyons que
Christ a souffert pour nous, et que, grâce à lui, le pardon
des péchés, la justice et la vie éternelle nous sont
accordés. Car Dieu veut que cette foi nous tienne lieu de
justice devant lui, il veut nous l'imputer à justice, comme l'explique
saint Paul aux chapitres 3 et 4 de l'Épître aux Romains.
Article 5. -- Du Ministère de la Parole
Pour qu'on obtienne cette foi, Dieu a institué
le Ministère de la Parole et nous a donné l'Évangile
et les Sacrements. Par ces moyens il nous donne le Saint-Esprit,
qui produit la foi, où et quand il le veut, dans ceux qui entendent
l'Évangile. Cet Évangile enseigne que nous avons, par
la foi, un Dieu plein de grâce, et cela non point à cause
de nos mérites, mais pour le mérite de Christ.
Nous condamnons donc les Anabaptistes et autres
sectes semblables, qui enseignent que nous pouvons obtenir le Saint-Esprit
sans l'instrumentalité de la Parole extérieure de l'Évangile,
mais par nos propres efforts, par nos méditations, et par nos oeuvres.
Article 6. -- De la Nouvelle Obéissance
Nous enseignons aussi que cette foi doit produire
des fruits et des bonnes oeuvres, et qu'il faut qu'on fasse, pour l'amour
de Dieu, toutes sortes de bonnes oeuvres que Dieu lui-même a commandées.
Mais il faut se garder de mettre sa confiance dans ces oeuvres et de vouloir
mériter par elles la grâce de Dieu. Car c'est par la
foi en Christ que nous obtenons la rémission des péchés
et la justice, comme le dit Jésus-Christ lui-même, Luc 17,
10 : « Quand vous aurez faites toutes les chose qui vous sont commandées,
dites : nous sommes des serviteurs inutiles ». Voilà
ce qu'enseignent aussi les Pères. Saint Ambroise déclare
: « Il est ordonné de Dieu que celui qui croit en Christ sera
sauvé, non point par les oeuvres, mais par la foi seule, recevant
ainsi la rémission des péchés gratuitement et sans
mérite ».
Article 7. -- De l'Église
Nous enseignons aussi qu'il n'y a qu'une Sainte
Église chrétienne et qu'elle subsistera éternellement.
Elle est l'Assemblée de tous les croyants parmi lesquels l'Évangile
est enseigné en pureté et où les Saints Sacrements
sont administrés conformément à l'Évangile.
Car pour qu'il y ait unité véritable
de l'Église chrétienne, il suffit que tous soient d'accord
dans l'enseignement de la doctrine correcte de l'Évangile et dans
l'administration des sacrements en conformité avec la Parole divine.
Mais pour l'unité véritable de l'Église chrétienne
il n'est pas indispensable qu'on observe partout les mêmes rites
et cérémonies qui sont d'institution humaine. C'est
ce que déclare saint Paul, Eph. 4, 5-6 : « Un seul corps et
un seul esprit, comme aussi vous avez été appelés
à une seule espérance par votre vocation ; un seul Seigneur,
une seule foi, un seul baptême ».
Article 8. -- Ce qu'est l'Église dans le Monde
L'Église chrétienne, à
proprement parler, n'est pas autre chose que l'Assemblée de tous
les saints et croyants. Cependant, dans ce monde, beaucoup de faux
chrétiens et d'hypocrites, et même des pécheurs manifestes
sont mêlés aux fidèles ; néanmoins les sacrements
sont efficaces, même s'ils sont administrés par des prêtres
impies, -- comme Christ lui-même a dit, Matth. 23, 2 : « Les
Scribes et les Pharisiens sont assis dans la chaire de Moïse, etc...
».
Nous condamnons donc les Donatistes , et tous ceux qui enseignent
autrement.
Article 9. -- Du Baptême
Nous enseignons que le Baptême est nécessaire
au salut, et que par le Baptême la grâce divine nous est offerte.
Nous enseignons aussi qu'on doit baptiser les enfants, et que, par ce Baptême,
ils sont offerts à Dieu et lui deviennent agréables.
C'est pourquoi nous condamnons les Anabaptistes,
qui rejettent le Baptême des enfants.
Article 10. -- De la Sainte-Cène
Quant à la Sainte Cène du Seigneur,
nous enseignons que le vrai corps et le vrai sang de Christ sont réellement
présents, distribués et reçus dans la Cène,
sous les espèces du pain et du vin. Nous rejetons donc la
doctrine contraire.
Article 11. -- De la Confession
Au sujet de la Confession, nous enseignons
qu'on doit maintenir l'Absolution privée dans l'Église et
ne pas la laisser tomber en désuétude. Toutefois, dans
la Confession, l'énumération de tous les délits n'est
pas nécessaire, puisque, en réalité, elle est impossible,
comme le déclare le Psaume 19, 13 : « Qui connaît ses
égarements ? ».
Article 12. -- De la Repentance
En ce qui concerne la Repentance, nous enseignons
que ceux qui ont péché après le Baptême peuvent
obtenir la rémission des péchés toutes les fois qu'ils
s'en repentent, et que l'Église ne doit pas leur refuser l'Absolution.
La vraie repentance comprend, en premier lieu, la contrition, c'est-à-dire
la douleur et la terreur qu'on ressent à cause du péché
; en second lieu, la foi en l'Évangile et en l'Absolution,
c'est-à-dire la certitude que les péchés nous sont
remis et que la grâce nous est méritée par Jésus-Christ.
C'est cette foi qui console les coeurs et qui rend la paix aux consciences.
Après cela, on doit amender sa vie et renoncer au péché.
Car tels doivent être les fruits de la Repentance, comme le dit Jean-Baptiste,
Matth. 3, 8 : « Faites les fruits dignes de la repentance ».
Nous rejetons donc ceux qui enseignent qu'une
fois converti, on ne peut plus retomber dans le péché.
D'autre part, nous condamnons aussi les Novatiens,
qui refusaient l'absolution à ceux qui avaient péché
après le Baptême.
Enfin, nous rejetons ceux qui enseignent qu'on
obtient la rémission des péchés, non par la foi, mais
par nos satisfactions.
Article 13. -- De l'emploi des Sacrements
En ce qui concerne l'emploi des Sacrements,
nous enseignons que les Sacrements n'ont pas été institués
seulement pour être des signes visibles auxquels on reconnaît
les chrétiens, mais aussi des signes et des témoignages de
la bonne volonté de Dieu envers nous, institués pour réveiller
et affermir notre foi. C'est pourquoi ils exigent la foi, et ne sont
employés correctement que si on les reçoit avec foi et si
on s'en sert pour consolider la foi.
Article 14. -- Du Gouvernement de l'Église
Quant au gouvernement de l'Église, nous
enseignons que nul ne doit enseigner ou prêcher publiquement dans
l'Église, ni administrer les Sacrements, à moins qu'il n'ait
reçu une vocation régulière.
Article 15. -- Des Rites Ecclésiastiques
Quant aux rites ecclésiastiques établis
par des hommes, nous enseignons qu'on doit observer ceux qu'on peut observer
sans péché et qui contribuent à la paix et au bon
ordre dans l'Église, comme par exemple certaines fêtes et
autres solemnités. Cependant nous précisons toujours
qu'on ne doit pas en charger les consciences, comme si ces sortes de cultes
étaient nécessaires au salut. Bien plus, nous enseignons
que toutes les ordonnances et toutes les traditions instituées par
les hommes pour réconcilier Dieu et mériter sa grâce,
sont contraires à l'Évangile et à la doctrine du salut
par la foi en Christ. Voilà pourquoi nous tenons pour inutiles
et contraires à l'Évangile les voeux monastiques et autres
traditions qui établissent des différences entre les aliments,
les jours, etc., par lesquelles on croit mériter la grâce
et offrir satisfaction pour les péchés.
Article 16. -- Du Gouvernement Civil
En ce qui concerne l'État et le gouvernement
temporel, nous enseignons que toutes les autorités dans le monde,
les gouvernements et les lois civiles qui maintiennent l'ordre public,
sont des institutions excellentes créées et établies
par Dieu. Un chrétien est libre d'exercer les fonctions de
magistrat, de souverain, de juge. Il peut sans péché
prononcer des jugements selon les lois impériales et les autres
lois en vigueur, punir les malfaiteurs au moyen de l'épée,
entreprendre une guerre juste, être soldat, acheter et vendre, prêter
serment sur injonction, posséder des biens, contracter mariage,
etc.
Nous condamnons les Anabaptistes, qui prétendent
que toutes ces choses sont contraires à la profession chrétienne.
Nous condamnons aussi ceux qui enseignent
que la « perfection chrétienne » consiste à quitter
sa maison, femme et enfants, et à renoncer à toutes les choses
mentionnées ci-dessus. Alors que la véritable perfection
consiste à craindre Dieu et à se confier entièrement
en lui. Car l'Évangile n'enseigne pas une conduite ou une
justice temporelle et extérieure, mais il insiste sur la vie intérieure,
sur la justice du coeur qui est éternelle. Il ne renverse
pas le gouvernement civil, ni l'État, ni le mariage, mais il veut
qu'on observe toutes ces choses, comme de véritables institutions
divines ; et il prescrite que l'on mette en pratique la charité
chrétienne dans ces états, et que chacun fasse des bonnes
oeuvres selon sa vocation. Il est donc évident que les chrétiens
sont redevables d'obéir aux autorités et aux lois, sauf dans
le cas où ils ne peuvent s'y conformer sans pécher.
Dans ce cas on doit obéir à Dieu plutôt qu'aux hommes,
Actes 5, 29.
Article 17. -- Du Retour du Christ pour le Jugement
Nous enseignons que notre Seigneur Jésus-Christ
apparaîtra au dernier jour pour le jugement. Il ressuscitera
tous les morts. Aux justes et aux élus il donnera la vie éternelle
et la félicité. Quant aux impies et aux démons,
il les condamnera à l'Enfer et aux tourments éternels.
Nous condamnons donc les Anabaptistes, qui
enseignent que pour les damnés et pour les démons les peines
et les tourments auront une fin. Nous rejetons aussi certaines doctrines
juives, que l'on rencontre aussi actuellement, d'après lesquelles,
avant la résurrection des morts, les justes et les pieux détruiront
les impies et règneront seuls sur la terre.
Article 18. -- Du Libre Arbitre
En ce qui concerne le Libre Arbitre, nous enseignons
que l'homme possède une certaine liberté de volonté
pour mener une vie extérieurement honorable et pour choisir entre
les choses accessibles à la raison. Mais sans la grâce,
l'assistance et l'opération du Saint-Esprit, il n'est pas possible
à l'homme de plaire à Dieu, de le craindre sincèrement
et de mettre sa confiance en lui, et d'extirper son coeur de la mauvaise
convoitise innée. Ceci n'est possible que par le Saint-Esprit,
qui nous est donné par la Parole. Car saint Paul déclare,
I Cor. 2, 14 : « L'homme naturel n'accueille point les choses qui
sont de l'Esprit de Dieu ».
Et pour qu'on sache bien que nous n'innovons
en rien, voici des paroles bien claires prononcées par saint Augustin
au sujet du Libre Arbitre (Hypognosticon, Livre 3) : « Nous confessons
qu'il y a chez tous les hommes un libre arbitre. Car ils possèdent
tous, par nature, la raison et l'intelligence innées. Non
pas qu'ils soient capables d'entrer en relation avec Dieu, comme par exemple
de l'aimer et de le craindre de tout leur coeur ; mais ce n'est que dans
les oeuvres extérieures de cette vie qu'ils sont libres de choisir
le bien ou le mal. Par le bien, je comprends ce que la nature humaine
est capable d'accomplir : par exemple, labourer un champ ou le laisser
en friche ; manger, boire, voir un ami, ou ne pas le faire ; se vêtir
ou se dévêtir, bâtir, prendre femme, exercer son métier,
et faire d'autres choses semblables qui sont bonnes et utiles. Et
encore, tout cela ne se fait pas sans Dieu et ne subsiste que par lui,
puisque c'est de lui et par lui que sont toutes choses. D'autre part,
l'homme peut aussi par son propre choix se déterminer pour le mal,
comme par exemple se prosterner devant une idole, commettre un meurtre,
etc. ».
Article 19. -- De l'Origine du Péché
En ce qui concerne l'origine du péché,
voici ce que nous enseignons : Quoique Dieu le Tout-Puissant ait créé
et conserve la nature toute entière, c'est cependant la volonté
pervertie qui produit le péché dans tous les méchants
et les impies. Car telle est la volonté du diable et de tous
les impies, qui s'est détournée de Dieu et s'est portée
vers le mal du moment que Dieu avait retiré sa main ; c'est ce que
dit Jésus-Christ, Jean 8, 44 : « Quand le diable profère
le mensonge, il parle de son propre fonds ».
Article 20. -- De la Foi et des Bonnes Oeuvres
C'est à tort qu'on nous accuse de prohiber
les bonnes oeuvres. Car les écrits des nôtres sur les
Dix Commandements et sur d'autres sujets analogues prouvent qu'ils ont
donné des instructions et des exhortations utiles et solides au
sujet des divers états chrétiens et de leurs oeuvres.
Autrefois, les prédicateurs parlaient peu de ces choses ; par contre
ils prônaient régulièrement, dans leurs sermons, des
niaiseries, des pratiques puériles et vaines, telles que rosaires,
cultes de saints, moinerie, pèlerinages, neuvaines, jours fériés,
confréries, etc. Aussi nos adversaires ne font-ils plus tant
de cas de toutes ces observances inutiles, comme ils le faisaient autrefois
; ils ont même appris à parler de la foi, dont autrefois ils
ne faisaient jamais mention. Ils vont jusqu'à enseigner maintenant
que nous ne sommes pas justifiés devant Dieu uniquement par les
oeuvres. Ils y joignent la foi en Christ, et disent : La foi et les
oeuvres nous justifient devant Dieu ; et sans doute, cette doctrine peut
offrir déjà plus de consolation que celle qui veut que l'on
mette sa confiance uniquement dans les oeuvres.
Or, puisque la doctrine de la Foi -- la plus
importante du Christianisme -- a été si longtemps négligée,
comme on est obligé d'en convenir, et que leurs prédicateurs,
partout, n'ont guère prêché que le salut par les oeuvres
: les nôtres ont instruit les fidèles de la façon suivante
:
Premièrement, nous déclarons
que nos oeuvres n'ont pas le pouvoir de nous réconcilier avec Dieu
ni d'acquérir sa grâce, mais que cela se fait uniquement par
la foi : lorsque nous croyons que nos péchés sont pardonnés
à cause de Christ qui seul est le Médiateur pour réconcilier
le Père avec nous (I Tim. 2, 5). Celui donc qui s'imagine
qu'il peut accomplir cela par ses oeuvres, et mériter la grâce,
celui-là méprise Christ ; il cherche un chemin à lui
pour aller vers Dieu, -- chose contraire à l'Évangile.
Cette doctrine de la foi est traitée
ouvertement et clairement par saint Paul en de nombreuses endroits de ses
écrits, particulièrement dans l'Épître aux Ephésiens,
où il dit (ch. 2, 8) : « Vous êtes sauvés par
grâce, par la foi, et cela ne vient pas de vous, c'est un don de
Dieu ; non par les oeuvres, afin que personne ne se glorifie, etc. ».
Et pour prouver que nous ne donnons pas ici une nouvelle interprétation
de Paul, nous mentionnons le témoignage de saint Augustin, qui expose
souvent ces choses, et qui enseigne aussi que nous obtenons la grâce
et que nous devenons justes devant Dieu, ce que démontre son livre
De Spiritu et Litera tout entier.
Bien que cette doctrine soit méprisée
de ceux qui ignorent les tentations, il est cependant certain qu'elle est
éminemment consolante et salutaire pour les consciences inquiètes
et terrifiées. Car la conscience ne pourra jamais trouver
le repos et la paix par les oeuvres, mais uniquement par la foi, dès
qu'elle s'assure que nous sommes réconciliés avec Dieu par
Christ, comme le dit saint Paul, Rom. 5, 1 : « Étant donc
justifiés par la foi, nous avons le repos et la paix avec Dieu »»
Autrefois, cette consolation n'était
pas offerte dans les sermons, mais on renvoyait à leurs propres
oeuvres les pauvres consciences qui, dès lors, se sont lancées
dans toutes sortes de pratiques. Il y eut des hommes que leur conscience
poussait à se réfugier dans les cloîtres, dans l'espoir
d'y acquérir la grâce par la pratique de la vie monastique.
On inventa aussi des oeuvres inédites pour acquérir la grâce
et faire satisfaction pour les péchés. Mais beaucoup
d'entr'eux ont prouvé qu'on n'obtient pas la paix du coeur par ces
moyens. Il était donc urgent de prêcher cette doctrine
de la foi en Christ et de l'inculquer avec insistance, pour qu'on sache
qu'on ne saisit la grâce divine que par la foi, et sans aucun mérite.
Nous instruisons aussi tout le monde, qu'ici
nous ne parlons pas de cette sorte de croyance qu'ont aussi les démons
et les impies. Ceux-ci aussi croient aux faits historiques ; ils
croient que Christ a souffert et qu'il est ressuscité des morts.
Mais nous parlons de la véritable foi, de celle par laquelle nous
croyons que par Christ nous recevons la grâce et la rémission
des péchés.
Quiconque possède cette foi, sait que
par Christ il a un Dieu propice, il connaît donc Dieu, il l'invoque,
et il n'est pas sans Dieu comme les païens. Car le diable et
les incrédules ne croient pas cet article, la rémission des
péchés. C'est pourquoi ils sont des ennemis de Dieu
incapables de l'invoquer et de s'attendre à quelque chose de bon
de sa part. C'est dans ce sens que l'Écriture parle des démons
et les impies. L'Épître aux Hébreux (ch. 11)
nous enseigne que la foi n'est pas la simple connaissance des faits historiques,
mais la confiance que Dieu nous donne ce qu'il a promis. Saint Augustin
nous rappelle que le terme de « Foi » dans les Écritures
signifie la confiance en Dieu, -- que Dieu nous est propice, -- et qu'il
ne désigne pas seulement une connaissance d'ordre historique, que
les démons, eux aussi, possèdent.
En second lieu, nous enseignons qu'il est
absolument nécessaire que l'on fasse de bonnes oeuvres, non pas
dans l'intention de s'y fier et de mériter la grâce, mais
par amour pour Dieu, et pour sa louange. C'est toujours la foi seule
qui saisit la grâce et la rémission des péchés.
Or, puisque par la foi le Saint-Esprit nous
est donné, le coeur devient aussi disposé aux bonnes oeuvres,
et capable de les accomplir. Car auparavant, puisqu'il est sans le
Saint-Esprit, le coeur est trop faible : de plus, il est sous le pouvoir
du diable, qui pousse la misérable nature humaine à des péchés
innombrables, comme nous pouvons le constater chez les philosophes, qui
se sont fait forts de mener une vie honorable et irréprochable,
mais qui n'ont point réussi, puisqu'il est notoire qu'ils sont tombés
dans de gros vices. C'est ce qui arrive chez l'homme lorsque, en
dehors de la vrai foi, et sans le Saint-Esprit, il se gouverne seul par
ses propres forces humaines.
Il n'y a donc pas lieu de reprocher à
la doctrine de la Foi de défendre les bonnes oeuvres. Au contraire,
,elle est à louer de ce qu'elle apprend à faire de bonnes
oeuvres, et de ce qu'elle offre précisément le secours nécessaire
pour les accomplir. Car en dehors de la foi, et en dehors de Christ,
la nature humaine avec son pouvoir, est de beaucoup trop faible pour faire
de bonnes oeuvres, pour invoquer Dieu, pour avoir patience dans les afflictions,
pour aimer son prochain, s'acquitter avec zèle des devoirs de sa
vocation, être obéissant, et réprimer les mauvaises
convoitises. Ces grandes et véritables bonnes oeuvres, on
ne saurait les faire sans l'aide de Christ, comme il le dit lui-même,
Jean 15, 5 : « Sans moi, vous ne pouvez rien faire ».
Article 21. -- De l'Invocation des Saints
En ce qui concerne l'Invocation des Saints,
nous enseignons que l'on doit conserver la mémoire des Saints, afin
que notre foi soit affermie lorsque nous constatons comment ils ont obtenu
grâce, et comment ils ont été secourus par la foi.
De plus, nous devons prendre leurs bonnes oeuvres pour exemples, chacun
selon sa vocation. Ainsi l'empereur peut, avec une bonne conscience,
suivre l'exemple de David lorsqu'il fait la guerre aux Turcs. Ils
ont, en effet, été établis rois tous les deux, et
cet office les oblige à protéger leurs sujets. Mais
on ne saurait prouver par l'Écriture qu'on doit invoquer les saints
ou implorer leur secours. Car il n'y a qu'un seul Réconciliateur
et Médiateur entre Dieu et les hommes : Jésus-Christ (I Tim.
2, 5), qui est l'unique Sauveur, l'unique Souverain-Sacrificateur, Propitiatoire
et Intercesseur devant Dieu(Rom. 8, 34) ; et lui seul a promis d'exaucer
nos prières. Le culte le plus excellent, selon l'Écriture,
consiste à chercher le Christ et à l'invoquer du fond du
coeur dans tous nos besoins et dans tous nos soucis. Saint Jean (I
Jean 2, 1) dit ceci : « Si quelqu'un a péché, nous
avons un avocat auprès de Dieu, Jésus le Juste ».
CONCLUSION DE LA PREMIÈRE PARTIE
Voilà en somme le résumé
de la doctrine que l'on prêche et enseigne dans nos églises,
pour une véritable instruction chrétienne et pour la consolidation
des consciences, et aussi pour encourager les fidèles à amender
leur vie. Nous n'avons pas voulu exposer nos âmes et nos consciences
au grand et redoutable danger d'encourir le châtiment divin en abusant
du nom et de la Parole de Dieu. Nous n'avons pas non plus voulu transmettre
à nos enfants et à notre postérité une autre
doctrine que celle qui est conforme à la pure Parole de Dieu et
à la vérité chrétienne. Puisque notre
doctrine est clairement fondée sur les Saintes Écritures
; puisqu'elle n'est nullement en même avec l'Église romaine
-- pour autant qu'on peut le connaître par les écrits des
Pères -- nous estimons que nos adversaires ne peuvent pas être
en désaccord avec nous quant aux articles ci-dessus. Pour
cette raison ils agissent donc entièrement sans charité,
avec précipitation et contrairement à l'unité chrétienne
et à l'amour, ceux qui se sont mis en tête de rejeter les
nôtres comme des hérétiques, de les condamner et de
s'en tenir à l'écart, et cela sans qu'ils puissent justifier
leur conduite par aucun commandement de Dieu ni par aucun témoignage
de l'Écriture Sainte. Car l'aberration et le désaccord
portent principalement sur divers abus et certaines traditions. Puisque
donc on ne trouvera chez nous aucun article principal qui soit erroné
ou destitué de fondement ; puique cette Confession que nous présentons
est une Confession divine et chrétienne : il serait équitable
que les évêques se montrassent plus modérés,
même s'il se trouvait chez nous un défaut en ce qui concerne
la tradition. Cependant nous espérons produire des raisons
solides qui nous ont portés à nous écarter de quelques
traditions et à corriger certains abus.
La deuxieme partie:
Articles qui sont contestés et
où l'on traite des abus qui ont été corrigés...