LES MIRACLES DE CHRIST, par Dr. Wilbert Kreiss - index
LE LEPREUX: Marc 1:40-45
Voici l'un des tout premiers miracles de Jésus racontés par les trois évangiles qu'on appelle les Synoptiques en raison de leurs profondes ressemblances (Matthieu 8:1-4; Marc 1:40-45; Luc 5:12-15). Le Seigneur avait opéré quelques autres guérisons qui ne sont pas relatées par la Bible, si ce n'est un exorcisme et la guérison de la belle-mère de Pierre (Marc 1:21-34; Luc 4:31-39).
Un lépreux vint à lui et... lui dit: Si tu le veux, tu peux me rendre pur:
Luc, le médecin, précise qu'il était plein de lèpre. Donc gravement atteint, inguérissable. Selon Matthieu, le malheureux appelle Jésus "Seigneur", d'un mot grec qui était souvent une simple formule de politesse du genre "Monsieur", mais qui exprime ici davantage que cela. Il confesse en effet la toute-puissance du Christ, en même temps qu'il se soumet à sa volonté: "Si tu le veux, tu peux...". Attitude humble et confiante de l'enfant de Dieu devant son Seigneur. C'est donc un croyant qui a reconnu en Jésus de Nazareth non pas un simple thaumaturge, mais le Messie. Il est prêt à rester malade jusqu'à la fin de sa vie, si telle est la volonté du Seigneur. Guérir est une bénédiction temporelle qui est utile et fait bien plaisir à celui qui en profite, mais qui n'est pas indispensable au salut. La foi de cet homme est forte et montre que la prédication de Jésus en Galilée portait des fruits.
Jésus, ému de compassion...:
Marc insiste souvent sur les sentiments et émotions de Jésus, ainsi que sur les réactions des foules. Il est ému de compassion, littéralement, selon le terme grec utilisé par un bon juif de l'époque, saisi au ventre, aux organes intérieurs que sont le coeur, le foie, les poumons et les viscères, autant de sièges des émotions. On aurait envie de dire que Jésus, en voyant ce lépreux, en a mal au ventre. Compassion de Jésus... L'une de ses qualités les plus profondes, les plus riches et les plus consolantes. La plus humaine, mais transcendée par sa nature divine.
Jésus... étendit la main, le toucha et dit...:
La compassion le pousse à l'action. Il touche le malade. Il touche un intouchable, un lépreux! Il ne faisait pas cela avec tous les malades qu'il guérissait. Ici, il le fait. C'est un signe. Il n'a pas peur de la lèpre et il est plus fort qu'elle. Il lui suffit de parler pour en guérir un homme, mais il accompagne la parole d'un geste riche de sens.
"Je le veux". Jésus accomplit le miracle par sa seule volonté. Il ne dépend pas de celle d'un autre, pas même, comme les prophètes et les apôtres, de celle de Dieu, mais détient personnellement la toute- puissance qui lui permet d'agir. En le voyant faire, les disciples contemplaient sa gloire, une gloire comme celle du Fils unique venu du Père (Jean 1:14).
Aussitôt la lèpre le quitta et il fut purifié:
Le récit du miracle est bref et sobre. Pas d'enjolivures, de détails piquants destinés à exalter le Christ. Le style des évangélistes est on ne peut plus simple et sobre, preuve sans doute de l'inspiration divine. Ils n'ont pas besoin de démontrer la divinité du Seigneur; il leur est simplement demandé de l'attester. En un instant la lèpre a disparu, les doigts rongés par la maladie ont été restitués à cet homme. La guérison fut instantanée et totale.
... avec de sévères recommandations...:
Le ton a changé. De la compassion, Jésus a passé à la sévérité. Pourquoi? Trois explications sont possibles: 1) La nouvelle du miracle ne devait pas être ébruitée avant que le lépreux se soit rendu au temple et montré aux prêtres. Donc soumission volontaire de Jésus à la loi de Moïse, et il faut que cela se sache. 2) Il ne voulait pas de bruit autour de son miracle pour ne pas être gêné dans son action, pour éviter un soulèvement des chefs du peuple avant que son heure soit venue. 3) Il a souvent affaire à une foule assoiffée de miracles, mais au fond incrédule, et ne veut pas d'une réputation de faiseur de prodiges (Marc 9:19). Faut-il choisir entre ces trois explications? Et si toutes les trois étaient vraies?
Va te montrer au sacrificateur:
Jésus envoie le lépreux au temple faire ce que Moïse avait prescrit. Cf. Lévitique 14:1-32. C'est un rite de purification accompagné de sacrifices, qui s'étendait à l'époque de Moïse sur une semaine entière. Il était composé de deux actes: 1) La présentation du malade au temple, avec constatation de sa guérison, accompagnée de l'offrande de deux oiseaux (Lévitique 14:1-98). 2) Une semaine plus tard, offrande de deux agneaux ou d'un seul, si l'intéressé était pauvre (Lévitique 14:9-32). Le premier acte réintégrait dans la société civile et permettait à l'ancien malade de vivre parmi les siens. Le deuxième lui rendait ses privilèges religieux et le réadmettait dans le temple.
L'attitude de Jésus est caractéristique. Il n'est pas venu abolir la loi, mais l'accomplir (Matthieu 5:17). Il est au-dessus de la loi et la transgresse en touchant le lépreux, un impur avec lequel il ne devait avoir aucun contact physique (Lévitique 13:46; Nombres 5:1-3). En même temps, il se soumet à elle, en l'envoyant dans le temple. Il viole la loi non pas par antinomisme, mais parce que son accomplissement est l'amour et que la loi n'est pas là pour nous empêcher d'exercer ce dernier. Il viole un précepte extérieur, rituel de la loi, au profit de son intention profonde. En d'autres termes, il fait la différence entre l'essentiel et l'accessoire, entre l'immuable et l'éphémère, l'éternel et le passager. C'est là un thème constant dans les évangiles. Cf. notamment les guérisons le jour du sabbat.
... afin que cela leur serve de témoignage...:
A qui? A la foule? Mais Marc ne la mentionne même pas. Non, il s'agit sans doute des prêtres et des pharisiens de Jérusalem. C'est à eux que Jésus envoie cet homme, pour qu'il leur serve de témoignage vivant. Pendant les sept jours qu'il passera à Jérusalem, dans le temple ou à proximité, il est chargé de rendre témoignage à la toute-puissance, l'amour et la messianité de Jésus de Nazareth, et aussi à son respect pour Moïse.
Mais cet homme... se mit à publier ouvertement la chose:
Désobéissance flagrante, si peu compatible avec l'humilité dont il avait fait preuve, mais psychologiquement fort compréhensible. Il veut exprimer sa joie et sa gratitude, et rendre service à Jésus. Mais à sa manière qui n'est pas la bonne. Il vaut toujours mieux servir le Seigneur de la façon dont il nous l'a demandé, en respectant sa volonté, qu'en choisissant sa propre façon de faire.
Le bruit du miracle se répandit, à tel point que les gens étaient braqués sur les prodiges qu'accomplissait le Christ et qu'il n'avait plus la possibilité de faire ce qu'il voulait faire et ce pour quoi Dieu l'avait envoyé: prêcher l'Evangile. Il resta donc en dehors des localités, dans les lieux déserts où les gens, devinant sa présence, venaient le trouver.
Thèmes de réflexion:
Questions de révision et exercices:
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